Interview d'Anne Sinclair dans le quotidien espagnol El pais le 5 février 2012
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El pais : le 7 mars prochain vous publierez un livre sur votre grand-père . Ce fut un personnage tr-s important pour vous ?
Anne Sinclair : il a été l'ami et le marchand de Picasso, Braque , Léger et Matisse et à beaucoup qu'il a contibué à faire connaître et France et ailleurs Il a quitté la France en parce qu'il était juif et persécuté par le Gouvernement de Vichy. Quand il s'est installé à new York, une partie importante de sa colection a été dérobée par les nazis et sa galerier est devenue un local de la Gestapo. Le livre raconte cette histoire avec de brefs morceaux impressionistes : c'est mon hommage et d'une certaine manière une revanche , un retour à cette identité qui jusqu'à maintenant était plus tournée vers le journalisme que vers l'art moderne .
EP- A l'université vous avez étudié le Droit , Quand avez vous senti l'appel du journalisme ?
AS -Depuis l'êge de 10 ans je voulais être journaliste et je crois que pour moi cela signifiait aider les autres et comprendre le monde . Mais j'ai étudié le Droit et le Sciences Politiques et je n'ai jaùmais fait de reportages ou d'investigations. Soudain je me suis retrouvé presque par hasard à la radio et ensuite à la télévision où j'aie la chance de me faire une place à une époque où il n'y avait pas de femmes dirigeant des programmes politiques. Pendant 13 ans j'ai produit et présenté 7/7 le rendez vous politique du dimanche soir . Le programme a eu un grand succès , avec une audience de 10 à 12 millions de personnes et j'ai eu la chance de gagner quatre 7 d'or .
EP: et vous vous êtes convertie en mythe de la "superwoman" : famille , enfant , réussite professionnelle....
AS: Comme toutes les femmes , j'ai essayé de concilier toutes les vies , sans y réussir toujours . Vie professionnelle , famille avec marie et deux enfants ensuite six dans une famille recomposée...Comme toutes les femmes qui travaillent j'ai fait ce que je pouvais ...
EP: Dans votre cas avec plus de moyens . Etant l'unique héritière de votre grand-père c'était plus facile ..le salaire vous importait ?
AS : Je ne me suis jamais considéré comme l'héritière de la famille et j'ai essayé d'ignorer l'histoire de mon grand père . J'ai fait ma carrière seule et je mesuis toujours sentie fière de gagner très bien ma vie . Je n'ai jamais dédaigné mon salaire et je n'ai pas compté sur d'autres ressources.
EP: Et la collection ?
AS: On a dit que j'avais des centaines de tableaux , mais ce n'est pas vrai . J'ai seulement reçu une petite partie quand ma mère est décédée il y'a quelques années. mais mes parents l'ont élevé toujours avec l'idée que je devais gagner ma vie toute seule .
EP: vous avez abandonné la télévision quand votre mari a été nommé Ministre. ce fut seulement pour ne pas vous retrouver en conflit d'interêts ?
AS -Je ne l'ai pas fait parce que j'étais la "femme de" si j'avais été la "soeur de " j'aurais fait la même chose . Mais j'ai considéré - et c'est quelque chose de très personnel, je ne veux donner aucune leçon, chacun fait ce qu'il veut - que cela supposait une conflit d'interêts J'ai toujours gardé un ton très libre , je posais les questions que je voulais et je ne voulais pas perdre cette liberté en me risquant à être vue comme la "femme du ministre de l'economie "De plus il y'avait 13 ans que le programme existait et je commençais à m'ennuyer . Je savais qu'un jour ou l'autre je devrai quitter la télévision et j'ai pensé qu'il valait mieux le décider seule plutôt que d'être obligée de le faire . Ensuite j'ai créé la web de TF1 , qui n'existait pas et j'ai fait quelques porgrammes culturels à la radio avant de quitter la france quand mon ari est a été nommé directeur du FMI.
EP: Vous êtes partie à Washington en étant un symbole féministe, mais quand vours êtes revenue les féministes vous ont accusé de trahison , indignées parce que vous n'aviez pas abandonné votre mari . Vous en avez souffert ?
AS : je suis aussi féministe que celles qui le proclament ! J'ai contribué à ce que les femmes puissent exercer un métier d'hommes . je me suis battue et je continue à me battre pour l'égalité des salaires et des reponsabilités et je crois être aussi féministe qu'une autre . En ce qui concerne ma vie privée, cela regarde seulement mon mari et ma famille et à personne d'autre Je ne me permettrai pas de juger la vie de quiconque et je revendique mon droit à conduire ma vie comme je l'entends et sans que personne s'en mêle
EP-On a dit que vous poussiez DSK à être candidat à l'élection présidentielle parce que vous r^eviez que la France ait le premier Président juif depuis Léon Blum .Est ce vrai ?
AS : On a dit tout et n'importe quoi (elle rit ) Je n'ai jamais souhaité que mon mari soit candidait , amsi je lui ai dit que si il le décidait je m'adapterai et je l'aiderai Pour finir ça n'est pas arrivé .... Vous savez j'ai connu le pouvoir de très près . Ca ne m'épate ni ne mimpressionne . Au contraire des créateurs et des penseurs pour qui j'ai une véritable admiration . je comprends que quelqu'un ait envie de diriger un pays, mais être la femme du président de la république ...ce n'est pas une ambition ! En France la première dame ne tient pas le moindre rôle et c'est très bien comme cela .Seuls les élus ont un rôle . Enfin, jamais je n'ai eu ce rêve .Cela fait partie des histoires qui se racontent .
EP- l'antisémitisme en France est-il un handicap ?
AS- Il existe toujours , mais beaucoup moins qu'à d'autres moments .Et je ne crois pas qu'il y'ait un obstacle à ce qu'il y'ait un président juif . Par contre nous sommes beaucoup plus loin d'accpeter un musulman. Finalement les américainc en élisant Barack Obama ont trangressés beaucoup plus de tabous que nous ....
EP- le blog que vous écriviez quand vous étiez à Washington montrait votre admiration pour Obama . Vous l'avez connu ?
AS- Vivre aux Etats Unis a été une expérience très riche . premièrement parce que je n'avais jamais vécu hors de france ( sauf quand j'étais bébé ) . Ensuite parce que c'est un pays fascinant, avec un côté stimulant et très différent de l'Europe . Et de toute manière vivre "in situ" l'lection d'Obama et la plus grande partie de son mandat a été passionant . C'est pour quoi j'ai décidé de faire ce blog , pour essayer d'expliquer aux français ce qui arrivait dans ce pays où je vivais . son système politique et aussi la vie quotidienne . J'ai seulement vu Obama et sa femme une seule fois . ce fut lors d'une réunion du G-20 à londres où j'avais accompagné mon mari. les deux m'ont fait une trsè forte impression.
EP- le 15 mai vous avez reçu la pire nouvelle possible . Comment on vit de se retrouver à la Une du monde entier ?
AS- ce fut violent de se sentir espionnée, scrutée, traquée . Ne pas pouvoir sortie sans que les paparazzi vous suivent , avoir les caméras visant les fenêtres de votre maison. Je crois que certianes limites ont été dépassées et il est urgent de rétablir de frontières entre la vie publique et la vie privée .
EP- mais j'imagine que vous comprenez que cette affaire était un roman ....
AS- oui je le comprends très bien . Mais une chose est de de s'occuper des personnes ayant du pouvoir et une autre de rentrer de manière obscène chez lui , de regarder derrière les rideaux ....
EP- Vous diriez que la presse française a changé depuis le temps de Mitterrand ou Chirac. Avant on ne disait rien sur la vie privée mais dans l'affaire de votre mari on nous a tout dit en long et en large ...cela dépend de quoi ?
AS- cette fois la presse française a opéré un virage . Avant elle était très timide , maintenat elle s'et mise à un niveau proche du voyeurisme. Mais ce n'est pas la seule , en Espagne et au Royaume uni les tabloÏds s'alimentent avec les histoires de la vie privée . La nouveauté c'est que dans ce cas des journaux théoriquement sérieux s'y sont mis aussi . je crois qu'il s'agit d'un changement d'époque plus que d'une question de pouvoir . Que voulez vous ? Il faut bien vendre ...(elle sourit )
EP- croyez vous qu'en France il y'ait trop de promiscuité entre presse et pouvoir ?
AS - Ce phénomène est très français , mais d'une autre nature et vient du non renouvellement de la classe politique et en même temps du non renouvellement des journalistes . Maintenant je le dis d'autant plus que je fais parie de ces antiquités ...bien que je sois passée par une large eclipse !
EP- Quelles différences voyez vous entre la presse françise et la presse des Etats Unis ?
AS- la bas c'est moins révérencieux et plus directe autant face à l'exercice du pouvoir du président que face aux propositions de l'opposition . Il y'a moins de espect pour ceux qui exercent le pouvoir . le président se soumet régulièrement à des conférences de presses dans lesquelles on peut poser des questions très dures et où il est attendu des réponses directes . en France il y'a plus de déférence face au pouvoir . Le président rend des comptes ( et c'est vrai pour Mitterrand , Chirac et maintenant Sarkozy ) sous la forme d'un schow télévisé ( souvent diffusés sur plusierus chaines ce qui est impensable aux Etats unis à part le discours sur l'Etat de la nation une fois par an ) assez monarchique et où les journalistes s'efforcent d'être de bons professionnels . Ici il n'ya ni l'intensité ni la simplicité du contact direct avec la presse . Là bas c'est ordinaire , ici c'est solennel .
EP- Parlons d'Internet . Souvent les rumeurs deviennent des nouvelles . est-ce une menace pour le journalisme ?
AS- Sur Internet il y'a le pire et le meilleur. Le meilleur est la rapidité et la transparence . le pire c'est assi la rapidité et la transparence. Vouloir aller vite ne signifie pas cesser de vérifier et copier les autres . la transparence signifie aussi l'incursion dans la vie privée , la diffusion de la rumeur qui peut se révéler fausse le jour suivant et ou se dissiper par ce que l'on appelle l'effet gommage : une information en relègue une autre et il n'ya pas de hiérarchie .
EP- Votre arrivée au Huffington Post a été presque un secret jusqu'à la fin .On a dit que vous vouliez partir vivre en Israel . Vous pensez quitter votre pays ?
AS- jusqu'à ce qu'un projet n'a pas recueilli l'accord des deux parties on ne peut rien annoncer . Quand les actionnaires ont scellés l'accord , nous nous sommes mis en marche le plus vite possible et nous avons annonce en même temps les termes de l'accord entre AOL-Huffington et les actionnaires français et la composition de l'équipe . Nous n'avons pas voulu faire un coup mais mettre en marche le web le plus en avant possibles pour que les internautes puissent juger en toute connaissance de cause .Quant à un départ en Israël, je dis toujours la même chose sur le besoin de roman des quelques journalistes . Nous n'avons jamais envisagé partir vivre hors de France .
EP- Vous avez montré beaucoup de reconnaissance à Arianna Huffington pour vous avoir permis de recommencer à travailler . Vous ne comptiez pas dessus ?
AS - Je n'avais pas de plans concrets . Je savais que je pouvais revenir à ma profession et de retour en France l'exercer normalement ce qui était plus difficile à Washington. La proposition de Arianna Huffington est arrivée à ce moment là et c'est une merveilleuse opportunité.Rendez vous compte , le lancement d'un nouveau média de communication, un pure player d'Internet au débt d'une année riche en évènements ....Présidentielles en France , aux Etats Unis , en Russie ; des révoltes démocratiques , ....la solidité de l'euro , les difficultés de l'Europe ...Cest un cadeau pour ceux qui aiment l'information ! Je suis flattée et émue que Arianna Huffington , dont je connais le travail parce que je lisais son web tous les jours , m'ait demandé de diriger le site . C'est le genre d'offre que personne ne peut refuser . Cest une femme intelligente et courageuse , avec une intuition qui lui a permis de créer le premier de moyen de communication on line des Etats Unis.
EP- Et maintenant il vous appartient de lui donnez une touche française ! Qu'allez vous faire ?
AS- Arianna a vu clairement q'en Europe pouvait se développer ma formidable palteforme et le savoirf aire du Huuf Post , masi seulement si on lui associe la culture de chaque pays . Je crois que c'est ce qui va se faire en Espagne avec vous et après en Italie . Avoir les rênes de ce magnifique attelage pour faire quelque chose en France est une grande opportunité . Bien que les rédactions européennes commencent avec peu de moyens et des équipes réduites la machinerie est puissante . Nous serons comme le modèle original , un site d'infos d'actualités avec des points de vue , nous ne donnerons pas seulement une information brute. de plus il y'a un grand espace paour des blogs des opinions qui son une partie important de l'ADN du journal. En France il n'ya pas de grands débats et je souhaiterais les ouvrir plus . Aux experts , aux anonymes , une infirmière ou un porfesseur des quartiers Nord de marseille , mais aussi à des philosophes , à l'économiste , le cinéaste , le ùmédecin . Nous mélerons les signatures , les célébrités , les jeunes et les plus âgés pour être un vrai forum de débat . Ceci est essentiel pour moi .
EP- Vous croyez que nous sommes au terme de la presse traditionnelle . Les journalistes allons nous nous éteindre ?
AS- je ne crois pas à la mort des journaux de papier et dans le tout Internet . C'est aussi ce qui a été dit à la naissance de la radio et ensuite la télévision. L'offre s'enrichit, et tout le monde doit s'adapter . Les journaux sont chaque fois plus pertinents pour amener ce qu'Internet ne sait pas faire . On doit être très prudents avec Internet : aujourd'hui en effet tout le monde peut être reporter ou photographe avec son blog, son tweeter ou son I phone. Mais il reste au journalisme l'essentiel de son rôle quel que soit le support , choisir entre l'important et l'accessoire, entre la rumeur et l'info. ceci est l'essence même du journalisme . Sur Internet et le reste . Nous devons vérifier les informations qui arrivent et nous questionner toujours même dans l'urgence : est-ce vrai ? Quelle importance devons nous donner à cette info ? devons nous la donner "brute" ou l'nalayser ? C'est ce que nous devons tenter de faire .Modestement . Comme tous les journaux !
EP- prendrez vous partie clairement pour les élections .?
AS nous prendrons partie pour les valeurs que nous défendons . Toutes les opinions seront les bienvenues , du moment qu'elles sont républicaines et démocratiques .
EP- Hollande offre t-il de meilleure recette pour la crise que Sarkozy ?
AS- Je ne vais pas vous répondre ( elle sourit ) . je suis une citoyenne qui vote , comme tout le monde et bien que mes opinions soient connues , je sépare la vie professionnelle de la vie personnelle là dessus comme sur le reste .
EP- Il ne vous paraît pas que la campagne est trop franco-française et pas assez européenne . Est ce que la montée du Front National vous préoccupe ?
AS- J'ai toujours lutté contre ses idées . Elles sont le contraire de ce que les françaises attendent , maintena t que nous sommes dans un monde ouvert dans une Europe ouverte et que nous devons faire face aux difficultés et aux drames liés à la globalisation. Evidemment faire du populisme est facile et pour le moins rentable . La réponse c'est une union des pays européens unis par leurs cultures , leurs valeurs et son développement peut freiner la décadence du continent . Je me situe contre la peur et l'obscurantisme. Je crois ue lors de l'élection il y'aura un projet de droite face à un projet de gauche Comme dans tous les pays qui nous entoure Comme en espagne C'est du moins ce que je souhaite.